2
Seigneur, mon Die
u et mon salut,
dans cette nuit où je cr
ie en ta présence,
3
que ma prière parvi
enne jusqu’à toi,
ouvre l’or
eille à ma plainte.
4
Car mon âme est rassasi
ée de malheur,
ma vie est au b
ord de l’abîme ;
5
on me voit déjà desc
endre à la fosse, *
je suis comme un h
omme fini.
6
Ma place est parm
i les morts,
avec ceux que l’on a tu
és, enterrés,
ceux dont tu n’as pl
us souvenir,
qui sont exclus, et l
oin de ta main.
7
Tu m’a mis au plus prof
ond de la fosse,
en des lieux englout
is, ténébreux ;
8
le poids de ta col
ère m’écrase,
tu déverses tes fl
ots contre moi.
9
Tu éloignes de m
oi mes amis,
tu m’as rendu abomin
able pour eux ;
enfermé, je n’ai p
as d’issue :
10
à force de souffrir, mes ye
ux s’éteignent.
~
Je t’appelle, Seigne
ur, tout le jour,
je tends les m
ains vers toi :
11
fais-tu des mir
acles pour les morts ?
leur ombre se dresse-t-
elle pour t’acclamer ?
12
Qui parlera de ton amo
ur dans la tombe,
de ta fidélité au roya
ume de la mort ?
13
Connaît-on dans les tén
èbres tes miracles,
et ta justice, au pa
ys de l’oubli ?
14
Moi, je crie vers t
oi, Seigneur ;
dès le matin, ma pri
ère te cherche :
15
pourquoi me rejet
er, Seigneur,
pourquoi me cach
er ta face ?
Commentaire
Une dernière carte à jouer pour Israël
Moïse est un prophète. L’Eternel lui annonce donc que le peuple se pervertira. C’est toute l’histoire du livre des Juges, de Samuel et des Rois, celle des défaites et de l’Exil qui, en quelques mots, va repasser sous les yeux de Moïse. L’Eternel « cachera sa face » selon le vieil hébraïsme, c'est-à-dire disgraciera son peuple. Pourquoi ? Parce que la Palestine est décrite comme un pays trop beau – en comparaison, surtout, des sécheresses des zones désertiques naguère traversées. Le peuple s’y est « engraissé » – au sens péjoratif spirituellement de ce mot. Mais l’Eternel le fera rentrer en grâce.
C’est une autre main qui intervient dans la rédaction des versets 24 et suivants, qui fait rapporter à Moïse les dispositions qu’il prend pour la conservation du livre de la Loi.
Ainsi commence, à l’audition de ce discours, le déploiement d’une dernière chance pour le salut d’Israël. Pour en souligner le caractère solennel, Moïse dit que, non observée, la Loi, qui devait garantir une alliance harmonieuse avec Dieu, va (finalement !) se retourner contre le peuple. Ainsi : « Que ce cantique puisse me servir de témoin contre eux » (19 et 21), de même que le livre de la Loi « placé à côté du coffre de l’Alliance » (25 et 26).
C’est dans ce sens que Jésus dit aux chefs et docteurs d’Israël : « Ne pensez pas que ce soit moi qui vous accuserai devant le Père : votre accusateur, c’est Moïse en qui vous avez mis vos espoirs. » (Jn 5,45 – il était en effet considéré comme le protecteur et le médiateur des Israélites devant Dieu.
Il ne faut pas voir, dans ce passage, l’expression d’un sombre pessimisme prophétique mais un constat lucide sur l’histoire des refus d’Israël. Il y a pourtant encore une dernière chance : son expression culminera à la Croix.