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Tu fais le bonheur de ton serviteur,66
Apprends-moi à bien saisir, à bien juger :67
Avant d’avoir souffert, je m’égarais ;68
Toi, tu es bon, tu fais du bien :69
Des orgueilleux m’ont couvert de calomnies :70
Leur cœur, alourdi, s’est fermé ;71
C’est pour mon bien que j’ai souffert,72
Mon bonheur, c’est la loi de ta bouche,
Commentaire
Méfiance
« J’ai grandi avec trois principes : « Méfiance, méfiance, méfiance ! … Mais cela ne m’a pas toujours servi… »
Quelle justesse dans ce cri du cœur : la méfiance est une bien mauvaise conseillère. Est-elle évitable quand on a été roulé, lésé, meurtri ? N’est-elle pas une réaction réaliste qui permet de se protéger du mal ?
Certes, le message biblique nous appelle au pardon, à la grâce, à l’octroi d’une deuxième chance … et même plus, si l’on considère le « 77 fois 7 fois » de l’Evangile ! On ne peut donc se contenter de laisser la méfiance gagner notre cœur et donner le ton à notre existence.
Le long processus que Joseph entame pour retourner un lien de confiance avec ses frères est intéressant et touchant.
Dans un premier temps, Joseph se montre dur avec ses frères. On peut y voir le besoin, bien humain, de se venger un peu ! Peut-être aussi d’exprimer sa méfiance : après tout ce qu’il a enduré de la part de ses frères: Mais surtout, ceux-ci ne prendront conscience de la blessure des sentiments fraternels de Joseph à leur égard, comme de la blessure qu'ils ont infligée à leur père, que lorsqu'ils auront eux-mêmes passé par les mêmes épreuves.
Il va les menacer de les enfermer comme ils l'ont enfermé autrefois (verset 15), puis garder effectivement l'un d'eux, Siméon, prisonnier (verset 24) en exigeant que les autres reviennent avec Benjamin, son frère de même mère. Il les déstabilisera de sus en leur rendant le prix payé pour le blé (verset 27-28). Puis, lorsqu'ils reviendront effectivement (chapitres 43-44) accompagné du benjamin Benjamin (!), et malgré son émotion, Joseph fera accuser celui-ci de vol, et donc passible de mort (alors que les frères ont promis-juré à leur père de prendre soin de lui). Ainsi, il les mettra en position de se désolidariser à nouveau du frère préféré. Et ce n'est que lorsqu'ils montreront leur regret d'avoir fait du mal à un frère autrefois, leur volonté de protéger à tout prix Benjamin, et par là de protéger leur père qui pourrait de chagrin, que Joseph se fera reconnaître.
A ce moment-là seulement, le pardon peut être donné et reçu sans engendrer de discorde nouvelle.