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Délivre-moi, Seigneur, de l’homme mauvais,3
contre ceux qui préméditent le mal4
qui dardent leur langue de vipère,5
Garde-moi, Seigneur, de la main des impies,6
les arrogants qui m’ont tendu des pièges ;7
Je dis au Seigneur : « Mon Dieu, c’est toi ! »8
Tu es la force qui me sauve, Maître, Seigneur ;9
Ne cède pas, Seigneur, au désir des impies,13
Je le sais, le Seigneur rendra justice au malheureux,14
Oui, les justes rendront grâce à ton nom,
Commentaire
Parce que je ne suis pas fou.
« Arrêtez, je n’en peux plus, vous êtes trop nombreux et trop forts, Dieu et vous, contre moi. »
A ce stade, on pourrait croire que Job – comme une personne en situation de « syndrome post-traumatique » – aurait envie, à bout de souffle, de se conformer à la pression de son entourage, se couler dans le moule du « tu as tort, c’est de ta faute, tu t’es trompé ! ». Pour essayer de souffrir un peu moins.
Mais non ! – Sa protestation, qui est aussi le signe qu’il a perdu, le signe que les autres sont plus forts : qu’on l’écrive en encre indélébile, qu’on la taille dans le roc ! Pas pour prouver, plus tard, que ce qu’il a dit était vrai. Pour prouver qu’il l’a vraiment dit. Qu’il n’était pas fou.
Ecrire pour faire durer ce cri et cette folie, qui réclament le droit d’être reconnus comme raisonnables : c’est le pari de l’incroyable poète, ou des poètes, qui ont ciselé le texte du livre de Job. C’est aussi fou, ou aussi raisonnable, que de dire : « Je sais que mon rédempteur est vivant. » Quelqu’un me défendra.
Mon Rédempteur est vivant, quelque part très loin. Qu’il me protège, et qu’il protège en moi ce désespoir et cet espoir, ces minuscules flammes qui tremblent en moi.