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Seigneur, corrige-moi sans colère3
Tes flèches m’ont frappé,4
Rien n’est sain dans ma chair sous ta fureur,5
Oui, mes péchés me submergent,6
Mes plaies sont puanteur et pourriture :7
Accablé, prostré, à bout de forces,8
La fièvre m’envahit jusqu’aux moelles,9
Brisé, écrasé, à bout de forces,10
Seigneur, tout mon désir est devant toi,11
Le cœur me bat, ma force m’abandonne,12
Amis et compagnons se tiennent à distance,13
Ceux qui veulent ma perte me talonnent,14
Moi, comme un sourd, je n’entends rien,15
pareil à celui qui n’entend pas,16
C’est toi que j’espère, Seigneur :17
J’ai dit : « Qu’ils ne triomphent pas,18
Et maintenant, je suis près de tomber,19
Oui, j’avoue mon péché,20
Mes ennemis sont forts et vigoureux,21
Ils me rendent le mal pour le bien ;22
Ne m’abandonne jamais, Seigneur,23
Viens vite à mon aide,
Commentaire
Des larmes qui purgent et reconstruisent
À première vue, les Lamentations ne sont rien d’autre que le hurlement d’un peuple ravagé. On pense aux pleurs et manifestations extraverties de deuil dans les rues des petites cités de l’Italie profonde, aux « Hélas ! Hélas ! » des tragédies grecques.
Ces chants de deuil furent composés, pense-t-on, par des Israélites restés en Palestine après le sac de Jérusalem par Nabuchodonosor et la déportation de 587.
Dans notre passage, l’auteur expulse d’abord longuement un désespoir poignant ; puis vient le discernement de la cause du malheur, attribuée au Maître de l’histoire de qui dépend toute décision, même la plus cruelle et incompréhensible (v. 17). Cette reconnaissance induit le repentir pour les péchés de Jérusalem, dont le principal est imputable aux prophètes qui n’ont pas annoncé ce qu’ils devaient (v. 14) : un message menaçant mais salutaire – s’il avait été diffusé intégralement et au temps où il aurait pu susciter un sursaut de conscience.
Une toute petite trouée de ciel moins noir, laissant augurer d’un minuscule espoir pour ‘Mademoiselle Sion’ – ainsi peut-on traduire l’expression ‘Fille de Sion’ :
« Puisque tu pleures, fais-le sincèrement et à fond ! Vide ton cœur en présence du Seigneur. Si ce n’est pour toi que tu espères un radoucissement de la Face du Seigneur, ose au moins l’espérer pour tes petits innocents et implore en conséquence ! » (v. 19).
Pouvoir purificateur des larmes humaines lorsqu’elles se mêlent à celles de Jésus qui contemple le désastre – spirituel, celui-ci – d’une Jérusalem qui, du haut de ses orgueilleuses murailles reconstruites, refuse, réfute, renie et récuse son Sauveur (Lc 19, 41-44).